La reconnaissance au quotidien – Le sourire

Novéquilibres : La reconnaissance au quotidien - Le sourire
A l’occasion de la publication de la 2ème édition de 10 gestes de reconnaissance au quotidien sur mon blog lesverbesdubonheur.fr, je vous propose de décliner ces gestes dans la vie au travail. Voici la première partie d’une série. Cet article est consacré au premier de ces 10 gestes de reconnaissance : le sourire.

Quand j’ai commencé à travailler sur un schéma concernant les gestes de reconnaissance, je me suis arrêté sur deux mots importants de la reconnaissance : “Merci” et “Bravo”. Quelques temps après, j’ai ajouté “Bonjour” et le sourire qui m’ont fait utiliser la formule : la reconnaissance en 3 mots et une banane. Puis deux mots ont complété cette série pour donner un schéma en 6 gestes.

L’année dernière, à peu près à la même époque, j’ai proposé un schéma en 10 gestes du quotidien. Le quotidien dans toutes les sphères de vie, en allant bien au delà de la sphère professionnelle.

La reconnaissance en sujet de société

La reconnaissance est un sujet important, voire essentiel de la vie au travail. Mais en réalité, à l’instar de la confiance, il s’agit bien d’un sujet de société qui balaye toutes les sphères de notre vie et participe à notre santé physique, psychique et sociale.

C’est la raison pour laquelle, le résultat de ce travail sur la reconnaissance a été publié sur mon blog lesverbesdubonheur.fr plutôt que sur laqvt.fr

Le premier geste de reconnaissance, abordons-le en un lieu que l’on peut considérer comme un sas entre la sphère professionnelle et les autres sphères de vie. J’utilise volontairement très systématiquement cette vision plurielle des sphères, mais ici, peut-être qu’il sera plus clair de le reformuler d’une manière plus classique : le sas entre la sphère personnelle et la sphère professionnelle.

La reconnaissance dans les transports publics qui nous conduisent au travail

Il est 8 heures, Paris s’est éveillée depuis longtemps pour de nombreux travailleuses et travailleurs. Je tente l’exploit à renouveler chaque jour : monter Place de Clichy dans une rame de la ligne 13. Une journée qui commence avec un niveau 0 de reconnaissance : j’ai du mal à embarquer dans la rame où j’ai l’impression nette que je ne suis pas le bienvenu. Il me faut m’excuser, prier, voire supplier qu’on me fasse une petite place à moi et à mon sac à dos dont on me fait comprendre par quelques regards désapprobateurs qu’il est de trop. Désolé, mais la ligne 13 ne dispose pas de soute pour les bagages jugés trop volumineux. Une fois ma place et demi gagnée (n’oublions pas mon sac), il n’y aura plus de regards dans la rame jusqu’à destination finale. Pourtant, ce n’est pas faute d’aller les chercher, mais ils fuient de la même façon que dans les ascenseurs. Il arrive dans le métro que certaines personnes soient agressées physiquement ou verbalement.
Par contre, croyez-moi, beaucoup, beaucoup d’entre nous réagissent comme s’ils étaient agressés par des regards qui osent s’arrêter sur eux; et la fuite du regard semble être la seule réaction possible (probablement aussi parce qu’elle est automatique). Je ne vous parle pas de ces regards lubriques (il y en a et j’avoue qu’avec bonheur je n’en suis pas destinataire pour une apparente bête question de chromosomes XY), mais de ces regards qui cherchent une interaction donnant reconnaissance que l’un.e et l’autre, nous existons bien dans cette rame dont on pourrait peut-être dire qu’elle ne se limite pas à un chiffre : le nombre de personnes qu’elle peut contenir, à savoir pour la ligne 13 le matin, bien supérieur au nombre supportable et raisonnable.

Alors changeons le logiciel sur la ligne 13 et dans beaucoup de moyens de transport en commun, un peu comme certains essayent de le faire. La ligne 13 pour celles et ceux qui lisent laqvt.fr depuis maintenant quelques années, ça vous rappelle quelque chose ? Une conductrice inconnue, qui le reste d’ailleurs encore à ce jour. J’avais consacré une brève à un de ses collègues sur la ligne 2, mais le bulldozer de l’archivage a fait disparaître la vidéo de canal+ qui lui était consacrée ainsi qu’une page facebook. Evoquons aussi ma rencontre avec Jérôme SCHIMPFF, commandant de bord à Air France que je salue en passant. Un être humain qui parle à des êtres humains et les reconnaît en tant que tel, qui reconnaît qu’ils peuvent se sentir mal à l’aise avec l’idée de confier leur vie à des pilotes le temps d’un voyage dans les airs.

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Des entraîneurs de reconnaissance qui nous facilitent la création d’interactions avec autrui. J’ai été frappé dans ces différents cas par les sourires qui sont nés sur les visages suite aux messages empathiques délivrés via des haut-parleurs; des regards ont commencé à se parler et quelques conversations ont pu éclore.

Alors, maintenant, il me faut être honnête : même si j’ai peut-être une sensibilité plus forte à la fois au déficit d’interaction et aux pépites d’interaction, il n’en demeure pas moins vrai que ma timidité me fait adopter plutôt le comportement commun dans les transports communs. Mais, peut-être sommes-nous nombreux à déplorer, à regretter cette aridité, à espérer quelques interactions, même minimes, un sourire, un bonjour, un mot, peut-être quelques simples mots de politesse, voire même des choses aimables à dire qu’on pense vraiment, même si elles sont futiles. Et pourquoi pas la météo ? C’est peut-être un fil à tirer pour quelque chose de plus.

Mais est-on prêt au côté aléatoire de la chose ? Tomber sur une interlocutrice ou un interlocuteur qui ne va plus nous lâcher ? Et là encore, il me faut avoir une vision discriminante : moi avec mon X et mon Y, je risque nettement moins d’être importuné que toute autre personne en double X.

Des expériences en neurosciences et en psychologie positive ont montré le pouvoir incroyable du sourire : le sourire qui donne indéniablement un signe de reconnaissance a aussi le pouvoir de mettre en actions nos neurones miroirs; un sourire qui s’adresse à moi entraîne une réaction automatique chez moi : je me mets aussi à sourire, propulsé dans un état de bonne humeur. A noter que ça fonctionne aussi dans l’autre sens : la mauvaise humeur appelle la mauvaise humeur.

Reconnaissons – puisque c’est le sujet – que notre journée de travail démarre dans de bonnes conditions quand on arrive sur son lieu de travail après avoir interagi dans les transports en commun avec des personnes qui nous ont souri, ont échangé des regards joyeux et bienveillants ou/et qui ont discuté sympathiquement avec nous. Plus globalement, ça nous fait voir la vie plus belle, le monde plus beau et nos congénères plus sympathiques.

En réalité, le 8 heures à Paris, dans une rame de la ligne 13 n’est plus dans mon quotidien. Mon installation en province et en pleine campagne m’a permis de me retrouver dans un milieu plus propice aux interactions le matin, bien que les opportunités soient largement moins nombreuses. La fréquence du sourire serait-elle inversement proportionnelle à la densité de la population autour de soi ?

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Imaginez la situation : repérez la personne qui vous semble la moins sympathique dans la rame de métro, puis fermez les yeux. Vous n’êtes plus dans le métro, mais échoué sur une île déserte depuis de trop nombreux jours. Et là, au loin, il vous semble voir une forme qui bouge. Une forme qui bouge, vous n’en avez pas vu depuis des lustres autres que les palmiers quand les vents se lèvent. Vous vous précipitez vers elle. Non, vous ne vous trompez pas, cette forme révèle bien une silhouette humaine. Et là, ce n’est plus un sourire mais une joie indescriptible qui va habiter votre visage. Vous allez courir à sa rencontre, vous allez vous embrasser, vous interroger mutuellement fiévreusement … vous et cet.te inconnue.e qui vous paraît tellement antipathique dans cette rame.

Quelques sourires qui changent beaucoup

Le sourire a deux pouvoirs considérables : premièrement, il donne de la reconnaissance existentielle, avec un rapport bénéfice/coût incroyable. Regarder quelqu’un, soutenir son regard puis lui adresser un sourire valant “bonjour, tu existes et je te trouve plutôt sympathique » est une bouffée d’oxygène dans un milieu confiné où le comportement classique est la fuite du regard constituant en quelque sorte tout simplement un déni de reconnaissance. Cette bouffée d’oxygène représente le deuxième pouvoir procuré par les neurones miroirs que certains appellent les neurones de l’empathie. Ces sourires nous propulsent dans la bonne humeur et vont peut-être représenter l’étincelle pour démarrer une conversation.

Quand je dis “sourire”, il ne s’agit pas de n’importe quel sourire : ni le sourire à vocation commerciale, ni le sourire forcé, ni le sourire de séduction; il s’agit du sourire naturel, authentique, celui dont l’intensité se mesure à la chaleur rayonnante des yeux. Un sourire qui transparaît quand on se met à parler. Jérôme SCHIMPFF a utilisé les mots suivants qu’il tenait lui-même d’un commandant de bord maintenant à la retraite : “Quand tu parles aux passagers, il faut qu’ils t’entendent sourire ».
Ce sourire porte un nom : le sourire de duchenne qui, en effet, met en jeu le muscle orbiculaire de l’œil.

Sur laqvt.fr et chez Novéquilibres, nous avons l’habitude de présenter l’étendue des champs de la QVT en l’explorant sur les 24 heures d’une journée. Et bien entendu, les sourires échangés en famille après le réveil et au petit déjeuner (Vs l’humeur grognon) et les sourires échangés pendant notre trajet en commun contribuent à notre Qualité de Vie au Travail (QVT). Et ensuite, tout au long de la journée de travail – et après, également – les sourires vont nous nourrir, nous permettre de nous sentir des êtres humains, des contributrices et contributeurs de l’organisation. Cela va nous permet aussi d’agir avec plus d’efficacité car les sourires induisent des émotions positives. En rappelant que les émotions positives ont l’effet « Broaden-and-Build » (« Etendre-et-développer ») étudié par Barbara Fredrickson (cf mon article Créativité, efficacité et QVT)

Pour beaucoup d’échanges dans la vie, en particulier pour les échanges commerciaux, quand on transmet quelque chose, on s’en départit (éventuellement pour une contrepartie) : je vends un livre : c’est un livre de moins dans ma bibliothèque. Je donne un vêtement : c’en est un de moins dans mon placard. Par contre, avec un sourire, je ne me départis de rien. C’est un peu comme si j’allume une bougie en moi, qui va permettre d’allumer d’autres bougies qui elles-mêmes pourront allumer d’autres bougies, voire pourraient revenir vers moi si ma bougie venait à s’éteindre suite à un mauvais vent.

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Le sourire sur mon visage a le potentiel de rendre la vie plus agréable et plus heureuse aux autres, mais déjà, il me rend la vie plus agréable et plus heureuse.

Alors, participons toutes et tous à la contagion du sourire en remerciant les neurones miroirs qui nous donnent un sacré coup de main pour apporter de la reconnaissance et la joie de vivre, au travail et plus globalement dans toutes les sphères de vie.

Les autres articles de la série :

Modification du 26/10/2023 : les gestes de reconnaissance au quotidien sont maintenant au nombre de 15. cf l’article 15 gestes de reconnaissance au quotidien pour une société de la Bienveillance.

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photo sous licence creative commons – auteur : Dave Shea

Olivier Hoeffel

Responsable éditorial de laqvt.fr Auteur des blogs lesverbesdubonheur.fr et autourdelabienveillance.fr

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