La QVT de Toni et Nino, traiteurs italiens en duo à Paris

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Dans la série “La QVT des solos », en passerelle avec la Qualité de Vie au Travail au sein d’un collectif, voici un reportage sur un duo de traiteurs italiens à Paris, deux frères inséparables dont l’attention familiale continue au travail. Un duo qui ne fait qu’un mais qui procure un soutien bien utile. Bienvenue dans les coulisses de Verbano Traiteur.

Selon qu’il a des achats à faire, Toni se lève à 4h ou 5h du matin. Le soir, il est de retour chez lui vers 21 heures – le samedi 20h – en moyenne 16 heures de porte à porte, embouteillages compris. Il se ménage des pauses : une pour le petit déjeuner, une avant l’ouverture de la boutique, et normalement 2 heures l’après-midi pour déjeuner et dormir… s’il n’a pas de rendez-vous médical (depuis quelques années, il se soigne !). L’après-midi aussi est émaillé de pauses. Commencer tôt lui épargne les embouteillages autant sur la route que chez les grossistes. Le soir, la boutique ne ferme qu’à 20h – à 19h le samedi. Traiteur, c’est un beau métier exigeant.

Son frère Nino a les mêmes horaires, des tâches différentes et quelques unes en commun avec Toni, il habite plus près mais le travail ne manque pas, et il n’est pas non plus chez lui avant 21 heures. Lui aussi a des pauses sacrées. Il faut pouvoir tout faire dans la journée sans se couper un doigt, se brûler, perdre patience entre eux, avec leurs clients, leurs fournisseurs, les tracasseries administratives.

Quand je les interroge sur leur QVT, ils me répondent :

La cuisine dans notre famille ça a toujours été très important ; on a plaisir à cuisiner de bonnes choses, et à procurer de bons produits aux clients. Ils le savent. Ca nous rend fiers. Il y a une bonne relation entre eux et nous. Ce sont des habitués, et le quartier étant très vivant, il y a aussi du roulement, on n’est jamais inquiets très longtemps.

Sinon, la routine, elle existe. Tous les jours il y a 1000 gestes à répéter(*), les mêmes plats à préparer, mais on s’amuse à en proposer d’autres de temps en temps, selon nos envies, ce que nous proposent nos fournisseurs italiens, une installation potentiellement concurrente à proximité, etc. Mais c’est une gestion très serrée. Tout est pensé, calculé, pesé… notre survie en dépend. On est confiants mais toujours vigilants.

Le plus dur ?

Le cumul de fatigue, physique comme mentale, quand sourire même demande un effort…

Autre chose ?

Le prix des denrées qui augmente, on n’ose pas répercuter à chaque fois sur les produits vendus. Il y a eu des augmentations continues sur la farine, donc sur les pâtes… Et certains clients ne pourraient pas suivre. Nous, on tient à eux comme ils tiennent à nous. Evidemment, le choix est cornélien…

Un petit bonheur ?

On avait envie de manger des Mozzarella in carrozza que faisait notre mère quand nous étions petits. Toni en a fait et on en a mis quelques uns dans la vitrine. La plus heureuse a été une cliente italienne de passage, on a partagé un souvenir d’enfance sans même se connaître !

Un autre ?

La relation avec de petits fournisseurs italiens ou français mais amoureux de leurs produits, des spécialités locales italiennes, des fruits et légumes savoureux, une palette de vins élargie après une formation à l’oenologie, des huiles savamment mélangées…

Le fait d’être deux frères ?

On a beaucoup de complicité. On se comprend vite, on connaît nos qualités et nos défauts mais on se respecte et on s’aime, la famille c’est sacré ! On n’a pas beaucoup de temps à s’accorder mais on fait attention l’un à l’autre. On se stimule, voire on se houspille tendrement, à la méditerranéenne ! Ca fonctionne assez bien. Une gestion familiale et démocratique (50-50 sur le papier et en pratique !), une attention accrue à la qualité de notre travail, à la relation avec les différentes parties, et (un peu trop tardivement) à notre santé. La récompense de l’année, c’est la coupure estivale : continuer à faire de bons petits plats, à consommer avec bonheur en famille ou entre amis, dormir tout son soûl, revenir au pays ou vadrouiller, visiter, vaquer !

 

Dans notre article de référence sur la QVT des solos, nous avons évoqué un des préalables à l’amélioration de la QVT : l’attention réciproque. La configuration de duo par rapport à celui de solo permet d’activer bien plus facilement l’attention réciproque.

Ainsi chaque membre du duo a capacité à porter intérêt et prendre soin de son binôme. Toni et Nino font attention l’un à l’autre à la méditerranéenne, c’est-à-dire en veillant fermement à ce que l’autre prenne mieux soin de lui, et en étant vraiment touché quand l’autre ne va pas bien. Ils n’hésitent pas à investir dans l’aménagement de leur lieu de travail s’il le faut pour améliorer leurs conditions de travail et préserver leur santé.

Le duo est par essence un collectif. Seulement les collectifs de cette taille, d’autant plus quand il s’agit de deux gérants, sont à mi chemin entre le solo et les collectifs de plus grande taille : les conditions de travail sont peu institutionnalisées et ils restent bien les acteurs principaux et premiers de la QVT, à l’instar du solo.

(*) Les marmites les plus lourdes sont aujourd’hui descendues des étagères de la cuisine. Elles sont maintenant à portée de main.

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