L’art de l’écoute, au café comme au bureau
Aaaah ! La journée de travail est enfin terminée et me voici bien calé dans un fauteuil à la terrasse d’un bar. Avec Robert, un copain et collègue de bureau, on parle boulot. Évidemment. Pas pour faire des heures sup, mais pour vider notre sac sur ce qui a coincé dans la journée.
Et une bonne part du sac est remplie de contrariétés vis-à-vis d’autres personnes (clients, collègues, chefs, sous-traitants…)
Pourtant, les personnes dont on se plaint sont peut-être au même moment, elles aussi, en train de parler de nous dans un autre bar ! Alors pourquoi ne pas réunir tous ce beau monde autour d’une seule table pour mettre à plat une bonne fois pour toute les sujets qui fâchent ? Eh bien ! Ma collègue « langue de vipère » et mon boss « j’ai toujours raison » ne supporteraient pas d’entendre mes mécontentements. Alors que mon copain Robert, lui, m’écoute sagement. Et c’est parce que je sais qu’il va m’écouter tranquillement, sans me couper la parole ou me sauter à la gorge, que je me permets de lui faire part de mon agacement ou de mes déceptions.
Le problème de la communication
Quand on parle de « communication » la plupart des gens vont traduire par « parler ». Au mieux « échanger sur un sujet ». Au pire « message à sens unique » (communication interne d’une entreprise de la hiérarchie vers les employés et le public).
Or pour qu’il y ait une véritable communication, il doit bien y avoir un émetteur (celui qui parle) mais aussi un récepteur (celui qui écoute). Et le problème est là.
Je veux bien parler de mes soucis, mais écouter les plaintes des autres NON !
Surtout si je suis partie prenante et que je suis mis en tort. C’est désagréable à entendre. Il est plus facile d’écouter les problèmes d’un ami dans lesquels je n’ai aucune responsabilité. C’est pourquoi il est si difficile de simplement mettre face à face des personnes qui ont des choses à se dire. Chacune pense sincèrement que parler du problème va seulement envenimer les choses ou au mieux cela ne servira à rien.
Savoir écouter est aussi important que savoir parler
Écouter, ce n’est pas rester silencieux en attendant que ça se passe. Dans une véritable écoute, il y a de l’attention portée à l’autre ainsi que de l’intérêt. Et lorsque je suis attentif et détendu les signes qui indiqueraient que je m’ennuie et que j’ai hâte que mon interlocuteur en finisse sont absents. L’autre sent que je l’écoute vraiment. Ce seul point permet de réduire rapidement la tension dans l’interaction et d’écourter la résolution du problème.
Si seulement mes collègues étaient tous comme Robert !
Maintenant imaginons un instant que je puisse parler à mes collègues comme à mon copain Robert, celui avec qui je décompresse à l’happy hour. L’ambiance au boulot serait bien meilleure. Mais nous l’avons vu, nous détestons être les récepteurs de protestations dont nous sommes peut-être la cause. Idéalement il faudrait pouvoir prendre du recul pour ne pas se sentir touché, un peu comme si j’étais le ” Robert ” de celui qui me parle. Et vice-versa, quand j’ai un problème avec un collègue, il se transforme momentanément en ” Robert ” (pas comme dans Wonder Woman, mais juste intérieurement). Alors il pourrait y avoir une écoute. Et donc communication.
Nous sommes tous, potentiellement, des ” Robert “
La bonne nouvelle c’est que je peux apprendre à rester neutre, détendu, sans attaquer pour me défendre ou serrer les fesses en prenant sur moi. Je peux apprendre à avoir l’attitude d’écoute sereine d’un ” Robert ” (pas le gros Robert, bien sûr, plutôt le genre Robert Redford, en plus jeune si vous voulez). Du coup je me lâcherai moins sur les bières le soir, m’évitant de devenir le gros Robert, et je dormirai mieux la nuit.
On nous apprend à parler, mais pas à écouter
Lorsqu’une personne est capable d’entendre les contrariétés d’une autre personne, comme si elle était tranquillement assise dans son lounge-bar préféré, c’est qu’elle maîtrise l’art de l’Écoute Centrée sur le Client (ECC). L’ECC peut être naturel, chez quelques rares personnes (que l’on aime côtoyer), ou apprise le plus souvent. L’Écoute Centrée sur le Client est basée sur l’approche centrée sur la personne de Carl Rogers.
C’est une approche humaniste de la personne où les jugements sont évités.
photo sous licence creative commons – auteur : joguldi