La juste conscience du corps
La vie nous donne un corps imposé au quotidien, puisque c’est par lui que nous sentons, agissons, exprimons, désirons, créons. Avec lui, nous nous adaptons, nous travaillons. Pour mieux vivre, il est indispensable de prendre conscience de la dimension corporelle d’une façon juste, en approfondissant tous les potentiels et capacités qui y sont liés, sans dépasser les possibles.
Au travail le corps devient un instrument ou un outil de production, et la recherche de productivité l’amène à se rationnaliser toujours plus. Il devient alors une machine à puissance de rendement. Et c’est là le problème… Il est oublié.
L’humain est intelligent mais…
Selon Paul D. MacLean, neurobiologiste américain à l’origine de la théorie sur le cerveau triunique, le cerveau humain s’est construit au cours de l’évolution en trois grandes étapes :
- Première couche avec le cerveau reptilien situé sur le tronc cérébral qui est responsable des comportements archaïques liés à la survie : se nourrir, se reproduire, fuir ou combattre. Ces comportements instinctifs et réflexes seraient fortement stéréotypés et ritualisés. Ce sont les comportements de base des reptiles et des poissons.
- Deuxième couche avec le cerveau limbique qui est venu se greffer sur le cerveau reptilien. Par système limbique, P D. MacLean désignait la partie centrale du cerveau (composée de nombreux noyaux et ganglions), qui fut dès lors considérée comme le « centre des émotions ». Outre celui des émotions de base, peur, colère, plaisir… le système limbique était considéré comme le siège des comportements de maternage que l’on observe chez les mammifères, permettant la vie en commun et les soins parentaux à l’égard de leurs petits.
- Troisième couche avec le néocortex apparu plus tardivement dans l’évolution, qui est la partie du cerveau située sur la couche externe des deux hémisphères cérébraux. Particulièrement développé chez les primates supérieurs (dont les humains), il était clair pour P D. Mac Lean que le néocortex était le siège des activités cognitives les plus élaborées.
Cette théorie de superposition a été abandonnée, l’évolution du cerveau étant envisagée sur un autre modèle. La même structure fondamentale du cerveau existe chez les membres de la classe des vertébrés que sont les poissons, reptiles, les oiseaux et les mammifères. Ce qui change d’un ordre animal à l’autre ou d’une espèce à l’autre, est le développement relatif de telle ou telle structure. Ce que nous avons en commun :
- L’anatomie avec le squelette, une colonne vertébrale avec des membres terminée par un crâne.
- Une physiologie avec les hormones
- Au niveau cognitif les 5 sens
- Le cerveau avec le tronc cérébral, le cervelet et le cortex.
Toutes ces structures sont présentes chez les vertébrés, même si la répartition et le volume sont différents. L’animal a surdéveloppé son cerveau reptilien au détriment du lobe frontal.
L’homme a surdéveloppé son lobe frontal (en particulier le cortex) au détriment du cerveau reptilien. Trop de raison et pas assez d’instinct.
L’intelligence est aussi émotionnelle…
Pour mieux fonctionner, la mise en pause du cerveau pensant va permettre d’accéder à l’intuition et donc à l’équilibre raison/instinct.
On a un GPS qui est aussi puissant que le saunar des dauphins pour nous adapter, c’est un système de guidage puissant. Par exemple, je peux réagir efficacement lorsque j’accueille une peur, en repérant les messages que le corps envoie pour vivre l’émotion et la reconnaître quand elle émerge avant qu’elle me submerge.
L’être humain est psychosomatique par essence, psychique et somatique sont liés et l’unité psychosomatique se fait par le travail de la présence dans le corps qui réactive la base du cerveau. Par exemple, le stress se mesure par électrode au niveau de la peau. Testé chez des joueurs de poker, quand la carte est gagnante tout va bien, quand elle est perdante tout va mal, car avant même de la voir le tronc cérébral le sait. Le préfrontal a pris le dessus et la peur sera mal gérée. Les signes physiques du stress (mains moites, cœur qui palpite…) sont des indicateurs et les prendre en compte permet de mieux s’adapter. Au lieu d’être perçu par le corps comme gêne, cela devient une aide pour faire équipe avec soi, association corps/mental.
L’intuition permet de capter certaines informations sans passer par la raison, il est possible alors d’anticiper des évènements, de percevoir mieux l’entourage, de faire les bons choix. Les récentes découvertes en neurosciences permettent de mieux comprendre ces mécanismes, qui sont appelés « Anticipation physiologique prédictive ».
L’expérience de l’instant présent, sans jugement ni a priori, permet de laisser venir l’intuition, de la laisser être pour la vivre pleinement. Si on cherche à se rassurer derrière les pensées, le raisonnement, en prenant en compte une tartine d’informations, nous risquons de nous éloigner de l’essentiel.
Vivre son corps c’est s’assurer d’une maîtrise, la maîtrise est dans le lâcher-prise et non dans le contrôle, mais c’est aussi découvrir ses faiblesses.
C’est alors que la juste conscience du corps est de mise, pas trop, juste bien, bon pour soi, l’équilibre pour une meilleur qualité de vie et Qualité de Vie au Travail (QVT) bien sûr…
A méditer en pleine conscience la citation d’Albert Einstein :
« Le mental intuitif est un don sacré et le mental rationnel est un serviteur fidèle. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et a oublié le don. »
Photomontage utilisant un dessin de Marianne de Nayer