Par ici la bonne soupe !

Les festivités de fin d’année sont passées. Des petits dérapages côté champagne ou/et chocolat ? Pour beaucoup, c’est l’heure des résolutions à la modération dans les assiettes : « juste une petite soupe au diner » ? Pas si simple. Comment se repérer dans l’offre alimentaire pour être sûr de « bien » manger ? En ce début 2018, voici quelques éléments pour privilégier une alimentation favorable à une bonne Qualité de Vie au Travail (QVT), car favorable à une bonne santé.

« Manger-Bouger »

En France, c’est le Programme National Nutrition Santé (PNNS) qui nous incite à manger, bouger. Il définit les repères d’alimentation en fonction de familles d’aliments, dont la combinaison optimale fournit tous les nutriments nécessaires.

7 familles d’aliments, 3 repas par jour et les recommandations suivantes :

  1. Sucre et produits sucrés : limiter la consommation
  2. Matières grasses : limiter la consommation
  3. Viandes, poissons, œufs : une fois par jour
  4. Lait, produits laitiers : à chaque repas
  5. Légumes et fruits : 5 par jour
  6. Céréales et féculents : à chaque repas
  7. Boissons : eau à volonté

Le programme recommande également de limiter la consommation de sel et d’augmenter les apports en fibres. On peut remarquer que 3 repas par jour ne sont plus tout à fait la norme, le petit déjeuner étant souvent oublié, et que la confrontation de ces recommandations au contenu des assiettes n’est pas toujours aisée.

L’offre alimentaire

Le choix est vaste parmi des gammes et des nouveautés à n’en plus finir.
Selon le dernier Baromètre Food/Edenred, les français placent l’envie du moment devant la valeur nutritionnelle et le prix, laissant la part belle à l’achat d’impulsion. Par ailleurs, on consacre de moins en moins de temps à cuisiner. Les plats tout prêts et les ingrédients “intermédiaires” (poudre à gâteau, pates à tartes, sauces, …) permettent de préparer rapidement un repas, complété d’un laitage au dessert. Biscuits et barres aux céréales viennent à propos combler un petit creux, dans l’après-midi ou en soirée.
Quand on fait ses courses, comment s’y retrouver dans les rayons, parmi les produits prêts à l’emploi, aux emballages riches de promesses, gourmands, sportifs, ludiques, luxueux, toujours sains …

Pour s’y retrouver : le Nutriscore

Derrière ces produits régulièrement achetés se cachent des apports nutritionnels et caloriques très divers. Afin de les différencier, la signalétique Nutriscore* a été retenue comme le seul logo nutritionnel en France, par arrêté fin octobre 2017.

L’arrêté précise le mode d’attribution du score nutritionnel : chaque aliment reçoit une note (de A à E) en fonction de sa teneur en fruits et légumes, fibres, protéines, calories, lipides et graisses saturées, sucres et sel. Cette note est associée à une couleur : A vert foncé, B vert clair, C orange clair, D orange foncé, E rouge.
Ce système permet de distinguer clairement, dans une catégorie, les aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Dans le cas de frites, aucune d’elles n’aura de A mais celles notées C seront meilleures d’un point de vue nutritionnel que les celles notées E.
Cet étiquetage est déjà mis en place par certaines entreprises mais reste facultatif, en raison de la réglementation européenne actuelle. Il est défendu par les responsables de santé publique, les sociétés savantes, les associations de consommateurs selon qui « un tel logo (…) devrait être rendu obligatoire en Europe ».

Par ici la bonne soupe !

Prenons l’exemple de la soupe de légumes, réputée diététique et à l’honneur en cette saison. L’offre du rayon s’élargit, tant en recettes qu’en procédés de fabrication. Sans citer de marques, déchiffrons les étiquettes pour comparer les nutriments ciblés par le Nutriscore et pertinents dans le cas d’une soupe (teneur en légumes, fibres**, calories, lipides et graisses saturées, sucres et sel)

  • La briquette individuelle apporte 120 calories pour 200ml. Proclamée « riche en légumes » – ce qui ne veut pas dire grand-chose et ne correspond à aucune allégation*** – elle contient 58% de légumes pour 1% de fibres, ce qui est faible. Elle apporte du sucre, des matières grasses saturées et beaucoup de sel : 2,3g par portion (soit le tiers des 6g par jour admis par les experts, sachant que nous nous porterions mieux encore avec moins).
  • Le sachet individuel de potage déshydraté vous invite à faire la pause. Reconstitué à 200ml après addition d’eau, il contient 59% de légumes, très peu de fibres et apporte 70 cal. Si l’apport en matières grasses est faible, ce petit bouillon contient de l’amidon de maïs, de l’amidon de pomme de terre, du sucre, des protéines de lait, des conservateurs et des exhausteurs de gout. Ce que vous ajoutez rarement à vos préparations maison.
  • Au rayon surgelé, la soupe de légumes en contient 45%, qui contiennent 1,4% de fibres, peu d’énergie (38 cal/100g) et moins de sel (0,5 g/100g) que les autres préparations. Cette soupe qui est de meilleure qualité nutritionnelle que les autres est constituée majoritairement… d’eau.

L’idéal pour vous comme pour la planète, reste le fait maison, frais du marché et bio si possible. Assez logiquement, on constate que ces trois soupes ne sont pas équivalentes et qu’elles n’obtiendraient pas le même score nutritionnel.
On peut refaire l’expérience avec les jus de fruits, les desserts lactés qui regardent du côté des produits laitiers, avec les céréales pour le petit déjeuner, les plats préparés, le rayon traiteur et comprendre que le Nutriscore est un outil bien utile pour se repérer parmi les produits alimentaires. A son crible, une grande quantité des produits transformés n’aurait pas la moyenne.

Nutriscore Versus Nutricouleurs

L’Alliance 7 qui regroupe les syndicats professionnels de la confiserie biscuiterie et nutrition spécialisée, préfère le code Nutri-Couleur développé par des multinationales de l’agroalimentaire. Chaque aliment reçoit non pas une, mais cinq notes. Pour en juger, le logo ci-dessus indique : moyen pour les matières grasses, mauvais pour le sel et les AGS, ok pour le sucre. La valeur nutritionnelle est donnée à la portion, notion floue. Avec ce système de notation moins clair, il est très difficile de définir les meilleurs choix nutritionnels dans un rayon.

La piste brésilienne : Nova

Si vous cherchez « Nova » sur un moteur de recherche, vous avez de bonnes chances de tomber sur une marque de yaourts. Pourtant sous ce nom se présente une nouvelle classification des aliments, mise au point par les équipes brésiliennes de l’université de Sao Paulo, réunis autour de Carlos A Monteiro

La classification Nova fait intervenir la nature, le degré et la fonction de la transformation qu’ont subie les aliments.

Dans les classifications des aliments, les paramètres de la transformation ont toujours été laissés de côté. Ils jouent cependant un rôle essentiel dans l’acquisition des propriétés nutritionnelles des aliments transformés. Fermentation, salaisons, confisage sont des transformations ancestrales qui changent souvent la nature des nutriments (du sucre à l’alcool par exemple, dans le cas de la fermentation alcoolique). Aujourd’hui raffinage, hydrogénation, cuisson-extrusion, foisonnement, traitements thermiques, ingrédients industriels et additifs modifient les qualités nutritionnelles des aliments transformés. Qui affichent toujours la mine d’un ami qui vous veut du bien.

Les 4 groupes Nova:

  • les aliments frais ou peu transformés (viandes et poissons frais, œufs, légumes, fruits, lait et jus pasteurisés)
  • les ingrédients culinaires transformés afin de les rendre utilisables pour cuisiner les aliments du groupe 1 (huiles végétales, beurre, sel)
  • les aliments transformés pour prolonger leur conservation ou améliorer leurs qualités gustatives, produits à partir des groupes 1 et 2 (légumes en conserve, fruits au sirop, fromages)
  • les Aliments Ultra Transformés (AUT) issus d’une « formulation industrielle élaborés entièrement ou presque de constituants dérivés d’aliments par une série de procédés complexes et l’ajout d’additifs non utilisés en cuisine ». Ils sont attractifs et prêts à consommer (certains plats préparés, snacks salés ou sucrés, confiseries, sodas).

Nova ne dispense pas d’interroger les apports en différents nutriments (protéines, glucides, lipides, vitamines, fibres) ni de maintenir la vigilance sur la variété des aliments que l’on consomme, quoiqu’au Brésil les recommandations nutritionnelles soient uniquement fondées sur cette classification.
Mais cette approche humaniste et intuitive de l’alimentation mérite un Nutriscore A +.

C’est un outil qui a été retenu par la FAO pour la recherche en nutrition santé. Nova a été utilisée notamment aux USA pour mesurer l’impact des AUT sur la consommation de sucre, au UK pour étudier l’impact des modes de consommation sur la qualité nutritionnelle des régimes alimentaires. Internationalement Nova a été utilisée pour comparer les stratégies des fabricants de tabac, alcool et AUT avec des conclusions pour la prévention et le contrôle des maladies non transmissibles. ****

Il ressort de ces recherches que « une alimentation basée sur les AUT a des conséquences sociales, culturelles, économiques, politiques et environnementales graves ». Au pays de la gastronomie classée au Patrimoine Mondial, ce serait bien qu’on en sache un peu plus sur cette super Nova !

Dans l’article du 8 novembre 2017 Bien manger pour bien travailler, nous avions rapporté les initiatives des entreprises qui proposent une alimentation de qualité dans les cantines et les restaurants d’entreprise, avec le soutien de la restauration collective. Utiliser le Nutriscore pourrait être intéressant à ce niveau. Ainsi la responsabilité collective conforterait la responsabilité individuelle (chacun de nous dans notre alimentation au travail et hors travail).

Et en attendant, le Nutriscore peut être soutenu car il le vaut bien.

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*Nutriscore une info globale http://www.mangerbouger.fr/Manger-Mieux/Comment-manger-mieux/Comprendre-les-infos-nutritionnelles2/Le-Nutri-Score-l-information-nutritionnelle-en-un-coup-d-oeil?gclid=CjwKCAiA4ILSBRA0EiwAsuuBLRW2o2CQ5A4uchk_IPC0NQNPtmcZjVlyv922n1NVoZUN8r0tePJBUhoCj2cQAvD_BwE
**Concernant les fibres alimentaires, il est conseillé d’en accroitre notablement la part dans notre alimentation habituelle. Le PNNS s’est d’ailleurs fixé comme objectif d’augmenter de 50 % la consommation de fibres. Il est ainsi recommandé de consommer entre 25 et 30 g de fibres par jour à l’âge adulte.
***Riche en… : Cette mention indique que le produit contient des teneurs significatives d’un nutriment. Cette mention ne peut être utilisée que si les teneurs de l’aliment en vitamines et/ou minéraux concernés sont supérieures à 30% des Apports Journaliers Recommandés pour une portion de 100g.
****28 Crovetto MM, Uauy R, Martins AP, Moubarac JC, Monteiro C. [Household availability of ready-to-consume food and drink products in Chile: impact on nutritional quality of the diet]. Revista Medica de Chile 2014, 142, 7, 850-858

Dominique Poisson

Dominique POISSON est consultante en nutrition, membre du comité éditorial de laqvt.fr, associée de Novéquilibres

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