Quand plus facile, moins cher et plus vite coûtent cher en terme de QVT et pour la société
Les fêtes de fin d’année approchent à grands pas. Dans la série juste conscience, et après avoir publié en décembre 2015 QVT et consom’action et à l’occasion de l’Université Ephémère sur la Qualité de Vie au Travail (QVT), l’innovation managériale et la coopération des 11 et 12 octobre 2017 5 types d’actions de consommacteur-rices pour améliorer la QVT sur le wiki dédié à cet événement, je reviens sur les impacts de nos achats sur la QVT d’autrui et plus globalement sur la qualité de vie.
Quelques clics pour quelques claques à la QVT
Qu’il est facile de faire ses achats de Noël en quelques clics. Et en plus, ça peut coûter moins cher … pour le porte-monnaie (on verra après qu’il y a de sérieux bémols) … et on peut commander presque le jour même pour le lendemain. Le rêve quoi !
Le rêve d’un instant peut-être, mais la réalité est toute autre pour celles et ceux qui contribuent, chacun·e à sa mesure, à ce que le colis finisse son parcours dans un coin de notre logement parce qu’on n’a pas encore eu le temps de le déballer.
Des médias ont relayé en fin de semaine dernière la poursuite du géant Amazon par le ministère de l’économie pour l’entretien d’un déséquilibre dans les relations commerciales avec ses fournisseurs. D’autres plateformes concurrentes, rappelées à l’ordre par la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) pour utilisation de clauses prohibées par le Code du commerce ont modifié en conséquence leurs clauses. Amazon avec des pratiques jugées plus déloyales (1) ne l’a pas fait et est donc assignée devant le tribunal de commerce avec une amende demandée d’un montant de 10 millions d’euros.
Qu’est-il reproché à Amazon ? Notamment, de pouvoir changer unilatéralement les délais de livraison (à la baisse, bien sûr), de pouvoir suspendre le contrat aussi de manière unilatérale et de fermer automatiquement le compte en fonction des avis négatifs d’acheteurs. Ce qui est interdit dans le droit français.
La vie au travail précarisée est constatée du fait de phénomènes tels que l’ubérisation. Avec de telles clauses, il s’agit en quelque sorte d’une précarisation de collectifs engendrant de la pression sur des organisations, par augmentation des contraintes (en matière de rapidité et de disponibilité) et de menaces sur l’activité. De la pression qui évidemment se reporte sur les individus qui forment le collectif, avec des impacts négatifs sur les conditions de vie au travail, dont la durée et l’organisation du temps de travail (cf étude Insee 2016), en particulier de travail le soir, la nuit, le samedi et le dimanche. Des impacts négatifs aussi sur la qualité du travail car on sait qu’à trop tirer sur la corde du temps, on dégrade la qualité.
En voulant soigner nos proches à Noël, par quelques clics on peut donc menacer le Noël de quelques-uns.
A noter aussi que l’optimisation fiscale utilisée par Amazon et d’autres géants leur fait échapper ou leur a fait échapper aux taxes au sein de l’UE ou/et leur ont fait bénéficier d’aides illégales (2) qui ont des impacts négatifs sur la qualité de vie des citoyens : c’est autant de moins potentiellement pour les actions sociales, culturelles, …
Des clics au déclic
La juste conscience, terme que nous avons introduit en 2015, c’est aussi, au-delà de la sphère professionnelle, la prise de conscience des impacts de nos achats sur la QVT d’autrui, en France et dans le monde entier.
Il n’est pas facile de connaître ce qui se joue dans l’arrière-boutique. Mais, quand des informations fiables nous parviennent sur des comportements que nous pouvons considérer comme déloyaux (il peut y avoir une forme de subjectivité dans cette qualification) dans l’arrière-boutique, nous avons matière à nous interroger et à chercher des alternatives. Il me semble que nous pouvons aussi renoncer à certaines facilités que l’on nous propose, facilités que l’on n’a pas vraiment demandées et dont on pourrait facilement se passer.
Nous pouvons aussi interroger le vrai coût des choses : payer pas cher au niveau individuel peut avoir des impacts négatifs importants au niveau collectif. En notant aussi l’effet pervers suivant : moins on paye cher, plus on nous renvoie (ou on se renvoie à soi-même) qu’en cas de problème, de casse, de défaut, on ne pouvait pas s’attendre à mieux. Et payer 3 francs 6 sous un objet qu’on met à la poubelle peu après, c’est tout simplement beaucoup trop cher pour notre porte-monnaie et potentiellement très cher pour la santé des personnes qui ont contribué à la fabrication, la commercialisation, le transport de l’objet et plus globalement pour le système de santé des pays concernés.
Alors, cliquons moins vite que notre ombre et claquons notre argent en juste conscience de l’impact social et écologique de nos achats pour préserver la QVT de l’ensemble de la société.
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(1) article Bercy réclame 10 millions d’euros à Amazon pour «pratiques abusives» sur 20minutes.fr
(2) article Optimisation fiscale : Bruxelles sanctionne Amazon et assigne Dublin en justice sur lemonde.fr