Incidence économique du Bien-Être dans l’entreprise
Le 22 janvier dernier se tenait, au Musée de la FFT à Roland-Garros, une conférence débat intitulée “L’incidence économique du Bien-Être dans l’entreprise”. Nous y avons assisté Dominique Poisson et moi-même, et vous rapportons quelques informations qui nous ont paru particulièrement intéressantes.
Contexte
Cette conférence était proposée conjointement par l’Agora du sport (6ème édition) et Malakoff Médéric.
Elle a été animée par Philippe Tallois & Sacha Génot, co-auteurs du livre « L’humain dans l’entreprise, un capital à préserver » (éditions Eyrolles).
Le bien-être a été abordé sous une dimension spécifique : celle du sport en entreprise. Néanmoins, les éléments présentés sur l’incidence économique ont effectivement porté sur le bien-être d’une manière globale.
Nous rappelons que le sujet du sport en entreprise fait l’objet d’une récente étude du CAS (Centre d’Analyse Stratégique). Nous avons fait écho de cette étude dans la brève Le CAS publie la note « Comment mettre le sport au service de la santé des salariés ? ».
Après l’article publié à l’occasion de cette même conférence par Dominique Poisson sur le bien-être vu par les DRH, je vous propose de nous intéresser à la partie de la conférence dédiée à l’impact économique du bien-être dans les organisations.
Les coûts de la non santé en chiffres
Marie-Maxime Bastien, Directrice Santé en milieu de Travail de l’entreprise québéquoise ACTI-MENU a présenté les résultats du programme Ma santé, je m’en occupe !. Il est déployé par ACTI-MENU depuis 10 ans auprès de plus de 70 entreprises, impliquant 100 000 salariés.
Une première série de chiffres a concerné les déterminants de la santé (1). Elle met en évidence que les habitudes de vie pèsent à elles-seules 50%.
Une deuxième série de chiffres interroge la part des salariés concernés par une problématique de santé ou de prise de risque. Les deux risques les plus fréquents, chacun touchant environ 70% des salariés, sont ceux liés d’une part à une mauvaise alimentation et d’autre part à une activité sportive insuffisante.
Les coûts directs et indirects de la non santé représentent jusqu’à 17% de la masse salariale (2).
Par ailleurs, la productivité d’un salarié sédentaire baisse de 12% (3).
Bientôt dans vos salles !
Le phénomène du présentéisme a été évoqué ainsi que son impact : 2 à 8 fois ceux de l’absentéisme et des frais médicaux directs (4). Gageons que le présentéisme sera probablement un sujet d’attention phare dans les mois et années qui viennent.
Les bénéfices économiques d’un programme de santé
Après les coûts, Marie-Maxime Bastien s’est arrêtée sur les bénéfices économiques de la mise en place du programme de santé “Ma santé, je m’en occupe !”.
Premier enseignement : les organisations font deux fois plus d’économie en gardant en bonne santé ceux qui ne sont pas malades qu’en dépensant pour du curatif.
Une étude scientifique a évalué l’impact économique du programme de prévention de la santé d’ACTI-MENU sur 3 ans chez Visa Desjardins (5).
On peut en retenir le ratio suivant :
1$ investi en prévention rapporte 1,5$ à 3$ après 3 ans.
L’agence européenne pour la santé et la sécurité au travail (OSHA) estime quant à elle que 1€ investi en prévention rapporte entre 2,5€ et 4,8€.
Faut-il mesurer les impacts économiques des programmes de bien-être en entreprise ?
Marie-Maxime Bastien nous a livré sa conclusion sur l’expérience de déploiement du programme “Ma santé, je m’en occupe !” et les actions qui ont été mises en oeuvre pour évaluer le Retour Sur Investissement (RSI).
L’évaluation du RSI constitue un véritable défi avec des coûts conséquents pour la mise en oeuvre.
Selon Marie-Maxime Bastien , il est plus opérationnel d’investir la question du Retour Sur la Santé (RSS) qui s’intéresse à l’évolution des habitudes de vie (et les impacts en terme de retour sur la santé), aux coûts engendrés par les mauvaises habitudes et aux coûts du programme.
Mon analyse
Quand l’organisation s’intéresse aux conditions de travail, à la qualité de vie au travail, à l’humain, elle est manifestement dans une démarche gagnant-gagnant.
Nous nous trouvons bien aussi dans une logique connue depuis longtemps : il vaut mieux prévenir que guérir.
<Mais, même si pour certains il s’agit tout simplement de bon sens, il faut des chiffres pour convaincre.
Les organisations ont besoin de chiffres pour assurer leurs investissements.
Par cet article, nous contribuons à la diffusion de ces chiffres qui sont des éléments qui peuvent peser lourd dans la décision d’un investissement pour améliorer la QVT dans une entreprise, ici dans le champ de la santé.
Maintenant, il faut aussi savoir se passer de chiffres. Arrêtons de mesurer tout, tout le temps, y compris des choses qui ne sont pas mesurables.
Le danger étant que, quand on ne peut pas mesurer quelque chose, cette chose disparaît de la liste des leviers sur lesquels l’organisation peut jouer efficacement à la fois sur la dimension économique et sur la dimension sociale.
Je renvoie à ce sujet aux propos tenus par Hervé Frapsauce, DG délégué des Assurances MMA que j’ai rapporté dans mon article sur la conférence sur la bienveillance au travail du 9 nov 2012.
Mes remerciements
Vous savez ce que c’est d’assister à une conférence où les conférenciers ont un temps réduit pour présenter des chiffres : les chiffres défilent vite, trop vite et au jeu de celui qui veut les reporter tous dans ses notes, il n’est pas facile de gagner. Et en l’occurrence, je dois dire, que je n’ai pas gagné à 100% (c’est mon côté optimaliste (6)).
Je remercie donc Catherine Mathieu de m’avoir communiqué après la conférence les chiffres présentés dans cet article et leur source. Catherine Mathieu est directrice associée de DEUXPOINTCINQ qui propose et déploie en exclusivité le programme “Ma santé je m’en occupe !” en France.
(1) Center For Disease Control
(2) Conseil du patronat du Québec
(3) Revue de littérature ACTI-MENU, en collaboration avec Groupe Analyse, 2011 ; incluant absentéisme et présentéisme
(4) Groupe Analyse, 2010
(5) Canadian Journal of Public Health en 2008, Watson Wyatt
(6) Idée développée par Tal Ben-Shahar dans son livre “L’apprentissage de l’imperfection”
photo sous licence creative commons – auteur : Public Domain Photos