J’exècre l’excellence

Novéquilibres : J'exècre le tout excellent
L’excellence, c’est un peu comme les pâtes, c’est servi sous toutes les sauces depuis quelques temps : l’excellence opérationnelle, formation d’excellence, l’excellence managériale, norme d’excellence, pôles d’excellence, les instituts (et autres dénominations) d’excellence, les internats d’excellence. Tout devient E..E..E..E. Euh, ce n’est pas un peu trop, non ? Le quadruple E qui va de pair avec le triple A.

Puisque tout devient excellence, peut-être pourrions-nous nous intéresser à une citation de Denis Diderot :

« Si tout ici-bas était excellent, il n’y aurait rien d’excellent. »

L’excellence devrait être exceptionnelle. Sauf que dans l’esprit de certains dans le monde du travail, l’excellence serait presque un dû, la contribution normale que tout individu au travail devrait apporter dans ses bagages le matin, voire en dehors du travail, puisque l’excellence est attachée bien solidement au téléphone portable qui ne nous quitte pas.

Et que se passe-t-il si nous ne sommes pas dans l’excellence ? Je sors de ma poche une deuxième citation – et je m’arrêterai là dans cet exercice – celle-là sous la plume de Montesquieu :

« Il semble qu’il n’y ait point de milieu entre l’excellent et le détestable. »

C’est bien là le problème : en-dessous de 10/10 (le tableau d’excellence), voire exceptionnellement 9/10 … c’est nul ! Le tout ou rien dans toute sa subtilité. Et c’est encore pire que ça : si on n’est pas excellent en permanence, rien ne va plus. Puisque le mot “durable” est aussi à la mode, la norme est bien “l’excellence durable et permanente”, dans tous les compartiments de la vie.

Alors, moi je propose que 7/10 ou 8/10, c’est bien et qu’on a aussi le droit d’en être satisfait (le tableau d’honneur, un signe de reconnaissance certain). En plus, quelques fois on peut avoir une meilleure note et d’autres fois une moins bonne. D’ailleurs, on n’est pas obligé de tout noter tout le temps.

Mais, qu’a voir mon histoire d’excellence avec la QVT ? Nous sommes tout de même sur laqvt.fr !
En terme de qualité de vie au travail, on sait que la reconnaissance est tout à fait déterminante. Comment s’intéresser à la reconnaissance quand la norme est l’excellence ? En-dessous, on ne la mérite pas, et au niveau d’excellence, il n’y a pas vraiment de quoi l’activer puisque c’est la norme. Depuis quand faudrait-il donner de la reconnaissance à quelqu’un qui fait tout juste ce qu’on attend de lui, même si c’est l’excellence ?

La recherche de l’excellence est une forme de fuite en avant qui souvent ne s’encombre pas des conditions dans lesquelles on pourrait l’atteindre et la maintenir. Les équilibres ne peuvent qu’en souffrir.

Alors, si vous ne trouvez pas mon article excellent, ce sera très bien pour moi : nous serons sur la même longueur d’onde… ou pas !

photo sous licence creative commons – auteur : b Tal

Olivier Hoeffel

Responsable éditorial de laqvt.fr Auteur des blogs lesverbesdubonheur.fr et autourdelabienveillance.fr

2 réflexions sur “J’exècre l’excellence

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