Réalisme et QVT
Améliorer la QVT (Qualité de Vie au Travail) dans le contexte économique et le marché de l’emploi actuels, est-ce bien réaliste ? C’est une question tout à fait pertinente à laquelle je vous propose de ne pas répondre aujourd’hui en préférant aborder l’impact du niveau de réalisme des objectifs sur la QVT. Ce qui me fera tout de même effleurer la première question.
La question du réalisme est intéressante à aborder dans sa dimension individuelle et sa dimension collective.
Dimension collective
Au niveau collectif, considérons le réalisme des objectifs que s’assigne l’organisation. En fonction du type de gouvernance, les objectifs seront construits, validés et partagés en sollicitant plus ou moins (ou pas du tout) le terrain et les différents niveaux de hiérarchie.
Moins grand sera le niveau de sollicitation de “ceux qui savent” la réalité du terrain, plus le risque est grand d’une perception par les collaborateurs que les objectifs sont irréalistes et d’une défiance vis-à-vis de la direction générale et des perspectives de l’organisation. Un risque pris en terme de QVT car cette dernière dépend en partie du sentiment de confiance dans l’avenir et de l’adhésion aux objectifs de l’organisation.
Dimension individuelle
Au niveau individuel, chaque collaborateur a des objectifs plus ou moins bien déterminés. Le réalisme de des objectifs individuels par rapport à ses compétences lui permettra de trouver un bon
équilibre entre le niveau des exigences et ses capacités à y répondre. On sait qu’un déséquilibre entre les deux constitue un risque de stress au travail, aggravé par un déficit de soutien. Il s’agit de considérer si ces objectifs sont adaptés et construits avec le collaborateur. Le collaborateur peut enrichir la définition des objectifs par sa propre expérience, ce qui améliora reconnaissance et QVT. Les échanges avec son manager, comme les échanges à tous les niveaux de la hiérarchie participent de l’articulation entre les dimensions individuelle et collective.
S’entendre sur les objectifs
Ces deux niveaux se combinent donc.
Un bon niveau de QVT pour un individu repose à la fois sur le réalisme des objectifs collectifs et le réalisme des objectifs individuels qui lui sont assignés.
Il est clair que la qualification du niveau de réalisme n’est pas toujours partagée : chacun l’évalue de son point de vue, avec les éléments qu’il a sous la main en considérant par ailleurs que la définition des objectifs comporte souvent un pari sur l’avenir, donc une dimension aléatoire. En fonction de la personnalité et l’expérience de chacun, la prise de risque n’est pas considérée de la même façon.
Une personne optimiste et une personne pessimiste n’aborderont pas le réalisme des objectifs de la même façon, d’autant plus quand il s’agit d’explorer des champs nouveaux (procédés, organisation, clientèle, métier, …).
Il est donc important que les collaborateurs puissent s’exprimer pour tenter un rapprochement. Deux mouvements possibles peuvent être combinés : ajuster les objectifs après concertation ou/et convaincre (et non persuader) du réalisme des objectifs, en prenant en compte les appréhensions et le niveau de confiance en soi.
Il faut être clair : le contexte du marché de l’emploi n’est pas favorable à ce rapprochement : bien souvent il est considéré que les collaborateurs n’ont pas leur mot à dire et que les mécontents n’ont qu’à prendre la porte. Cette vision porte en fait préjudice aux individus et à l’organisation : elle le paye par un niveau de motivation en berne et des impacts sur la performance.
Le réalisme des objectifs est une question essentielle pour la QVT dans la mesure où elle influence l’attitude de chacune et chacun par rapport à son travail, sur la qualité du travail, c’est-à-dire sur la capacité de pouvoir être fier de son travail et d’atteindre les objectifs individuels et collectifs. Le bien-être psychique est en jeu. La performance aussi, car du réalisme des objectifs naît aussi l’engagement juste – entre le désengagement et le surengagement – qui permet de concilier la QVT et la performance durable de l’organisation.
photo sous licence creative commons – auteur : Novéquilibres