La reconnaissance au quotidien – Mon point de vue constructif

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A l’occasion de la publication de la 2ème édition de 10 gestes de reconnaissance au quotidien sur le blog lesverbesdubonheur.fr, nous vous proposons de décliner ces gestes dans la vie au travail pour viser l’amélioration de la Qualité de Vie au Travail (QVT). Je prends le relais avec cet article consacré au neuvième de ces 10 gestes de reconnaissance : “Mon point de vue constructif”, un geste valorisant, révélateur d’attention, et, de mon point de vue… un geste révélateur du bien travailler ensemble.

En quoi le fait de donner son point de vue constructif représente un geste de reconnaissance ? L’expression en évoque d’ailleurs une autre… Des points de vigilance sont nécessaires mais le jeu en vaut la chandelle.

Point de vue constructif ou critique constructive ?

Donner un point de vue c’est subjectif, mais neutre affectivement. On peut supposer qu’il soit différent d’un point de vue préalablement posé, mais il n’est pas nécessairement opposé. Il peut proposer un autre axe de réflexion, ou enrichir le premier point de vue. Et quand bien même il serait opposé… la personne sujet n’est pas son point de vue.

Adresser une critique est moins neutre. Cela implique une idée de jugement défavorable qui peut affecter la personne qui le reçoit. Le point important est que cela demande un examen détaillé de ce qui est critiqué, ce qui prouve l’attention accordée au propos initial.

Constructif, c’est le mot magique. Celui qui ajoute de la valeur au point de vue, qui clarifie l’intention positive de la critique.

La construction d’un édifice sera d’autant plus stable que de multiples points de vue auront été étudiés comme autant de paramètres enrichissant la connaissance, quitte à déconstruire un élément pour le reconstruire de façon plus stable.

Embarquer dans la réflexion de quelqu’un, c’est donner de l’importance à son propos, puisqu’on s’appuie dessus pour élaborer la sienne. C’est à la fois se donner la peine d’accueillir le propos exprimé, prendre le temps de le comprendre, donc de lui accorder de l’attention, avoir l’intention d’enrichir son propre propos, et de le partager en retour. Par le jeu de l’attention réciproque (*) et dans un climat de confiance (**), le point de vue alternatif sera bienvenu. La co-construction vise une version finale partagée, dans l’intérêt de tous.

Exemple : Si je donne mon point de vue sur le propos de Valentin, cela implique (doit impliquer) que je me le suis approprié, puis que je me suis appuyée dessus pour effectuer mon propre cheminement de pensée. Celui-ci aboutit à un point de vue qui peut confirmer le propos de Valentin, révéler un paramètre qu’il n’aurait pas pris en compte, jusqu’à éventuellement contredire sa conclusion. Nous verrons que les deux dernières options demandent un peu de délicatesse de ma part. Dans un environnement coopératif, donner un point de vue alternatif participe d’une certaine réciprocité : l’idée est de partager en retour de quoi permettre à Valentin d’affiner sa réflexion en continuant par son propre cheminement. L’opération peut se renouveler jusqu’à ce nous partagions finalement le même cheminement, et tombions d’accord sur un objet commun. Tout le monde y gagne : l’organisation, Valentin et moi éprouvons la satisfaction de l’aboutissement positif d’un échange, du travail bien fait, collectivement, de la gratitude et de l’estime réciproque, quels que soient nos liens hiérarchiques.

Points de vigilance

La reconnaissance du cheminement de Valentin se traduit par une écoute attentive de son propos. Ensuite, je lui reconnais implicitement de la valeur puisqu’il m’est utile pour tisser ma propre réflexion.

La reconnaissance du cheminement de Valentin a souvent besoin d’être explicite à un moment ou à un autre.

Si mon point de vue complète son cheminement : je vais plus loin, mais cela ne doit pas occulter le premier jalon posé par Valentin. Cela pourrait revenir à poser la dernière touche qui change tout sur un tableau que Valentin aurait savamment composé. Ou bien de présenter un dossier en mon nom, alors qu’il aurait été bâti en partie grâce au travail de Valentin. La participation de Valentin qualifiée à sa juste valeur doit être citée au moment adéquat.

Si mon point de vue écorne son cheminement : Pour peu qu’il n’ait pas intégré le droit à l’erreur, Valentin peut se sentir dévalorisé. A fortiori, s’il a déjà subi un environnement très compétitif ou que son ego est un peu surdéveloppé, il peut alors ressentir une profonde vexation et réagir par divers comportements allant du repli sur soi jusqu’à l’agressivité. Résultat : je monte peut-être sur le podium à sa place, mais tout le monde a perdu l’apport potentiel de Valentin, l’affinage de la réflexion par les feedbacks successifs donc probablement la qualité du résultat, sans parler de la tension de nos relations de travail et de la défiance installée. C’est le moment de le rassurer, de se comporter de façon à ne pas induire un jugement négatif sur l’erreur (une erreur n’est pas une faute). Reprendre avec lui le cheminement où vous décelez l’erreur permettra de lui donner l’opportunité de modifier par lui-même son propre cheminement. Il éprouvera de la satisfaction,  et s’il en manquait acquerra de la confiance et assumera ses futures erreurs comme celles de ses collègues pour un engagement accru dans une intelligence collective féconde. C’est gagnant-gagnant !

Dans un groupe, il faut prendre en compte que des cheminements distincts et parallèles se font. L’envie (parfois frénétique) de partager le sien est couplé avec la crainte de perdre le fil de sa pensée. Pour que chacun ressente de la reconnaissance, et soit motivé à tisser une réflexion réellement plurielle, il est nécessaire de respecter certains principes comme par exemple nommer les auteurs des éléments repris, éviter de couper la parole pour laisser s’exprimer tous les paramètres d’un argument, s’entendre sur des modalités particulières de travail de groupe. Un rôle d’animateur permet de maintenir ces points de vigilance.

Un autre point de vigilance peut être relevé, celui de ne pas trop tirer la couverture (à soi mais aussi à son style de pensée) en donnant systématiquement son point de vue. Le risque est double : celui de démotiver plutôt que de donner de la reconnaissance, et également de passer de l’influence constructive à l’habitude d’une forme de pensée routinière défavorable à l’innovation(****).

Enfin, il est intéressant de rappeler qu’il est à la portée de l’organisation d’induire ces ingrédients indispensables (climat de confiance, bienveillance, coopératif, reconnaissance des apports partiels, droit à l’erreur…) pour que le point de vue constructif soit vécu comme une reconnaissance : il suffit de compléter l’évaluation individualisée des performances par une bonne dose d’évaluation collective(***). C’est une responsabilité organisationnelle.

Un bon moyen d’accorder singuliers et pluriel !

Les autres articles de la série :

(*) Lire ou relire l’article sur l’attention réciproque sur ce concept d’Olivier Hoeffel

(**) Lire ou relire coopération et confiance où j’ai traité la relation vertueuse entre un comportement et un ressenti

(***) Lire ou relire cultiver les valeurs collectives dans lequel je cite quelques bonnes pratiques relevées dans un rapport de la FNEP

(****) Lire ou relire juste conscience : être à sa juste place

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photo sous licence creative commons – auteur : joushikijin

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