La qualité de vie pour tous (2)

Novéquilibres : La qualité de vie pour tous - 2

 

J’ai entamé un petit marathon pour tordre le cou à certaines idées reçues quant au bien-fondé de penser à la qualité de vie au travail des personnes qui … travaillent. Fin janvier j’ai évoqué celle des chômeurs : rechercher un emploi requiert un travail certain. Passons à une autre catégorie de personnes, parfois également laissées pour compte par elles-même comme par la société.

Une discussion amicale : suite

Notre personnage, appelons-le Jean Nabaossi, est assez satisfait de son petit effet(1). C’est rare qu’il se présente sous cet angle. Il constate une qualité de regard et de silence différente de celle qu’on lui renvoie lorsqu’il évoque son statut de demandeur d’emploi. D’ailleurs, il éprouve lui-même et ressent de la part de ses interlocuteurs de la simple  considération à son égard, une valeur très QVT(2).

Une jeune femme reprend le fil de la conversation :

– Moi aussi j’ai une activité super enrichissante. J’ai l’impression d’être utile, et j’en apprends tous les jours. Au début, je pensais apporter mes compétences, en fait elles évoluent beaucoup et j’apprends aussi beaucoup des autres ou des situations de travail. Je peux parler de développement autant personnel que professionnel. Le problème peut-être, c’est que je suis tellement engagée que j’ai du mal à sortir la tête de l’eau. Alors en matière de gestion des rythmes, de repères de mes limites, d’équilibre entre mes sphères de vie, je pourrais mieux faire.. mais je suis tellement convaincue !

– Et tu es payée correctement ?

Alors la rémunération, c’est pas la question : je me suis engagée dans cette activité par conviction. J’ai parfois du mal à joindre les deux bouts mais j’assume mes choix. Enfin pas toujours, c’est vrai… Parfois je me demande ce que je fais là, mais d’autres fois, quand je vois que j’ai fait avancer les choses, ou bien quand on me le dit, c’est une vraie récompense.

– J’ai compris, tu bosses dans le social.

– On peut dire ça. C’est enthousiasmant mais aussi parfois déstabilisant voire décourageant… Du travail j’en ai à la pelle, mais j’essaie de ne pas en faire plus que je peux. C’est pas facile, d’autant que je ne suis pas à plein temps et parfois on est tellement débordés… Enfin je ne suis pas la seule à m’investir, chacun a sa façon de mettre du coeur à l’ouvrage.

– Au moins tu as l’air d’aimer ce que tu fais !

– Le moteur de mon activité est puissant, mais il faut que je prenne soin aussi de la carrosserie si j’ose m’exprimer ainsi. Il faut sans cesse relativiser pour garder un équilibre autant psychique que physique. Parfois je suis trop la tête dans le guidon. Après les périodes de rush, je fais un break.

 

… Après quelques minutes d’échanges Jean Nabaossi demande en souriant :

– Et tu es … ?

– Je suis bénévole dans une association.

 

Le bénévolat correspond véritablement à du travail

Qu’elles soient d’ordre administratif, organisationnel, fonctionnel, créatif ou répétitif, les activités bénévoles consistent bien en l’accomplissement de tâches plus ou moins complexes, à orchestrer avec celles des autres bénévoles, de salariés, des bénéficiaires eux-mêmes, etc en vue d’une finalité clairement affichée. Dans l’accompagnement de jeunes, de personnes en difficulté temporaire ou permanente, dans les domaines sportifs, culturels, sociaux, éducatifs, humanitaires, les tâches à effectuer sont même parfois très exigeantes. Les bénévoles peuvent être mus par des convictions, un plaisir / besoin de transmettre, un besoin de maintien de lien social, voire de positionnement social, d’action solidaire, etc. Il n’en reste pas moins que le temps qu’ils donnent est occupé à écouter, accompagner, conseiller, réfléchir, adapter, imaginer, organiser, arbitrer, communiquer, mobiliser, etc. selon toute la diversité des domaines approchés.

La responsabilité de l’organisation est déterminante

Etymologiquement, le bénévole veut bien et veut le bien, ce qui donne au vouloir une dimension plus ou moins exigeante. Bienveillant, dévoué, désintéressé en matière de rémunération, il n’en reste pas moins un être humain qui agit, en travaillant. La qvt concerne donc autant les bénévoles que les salariés qu’ils côtoient, la période de bénévolat étant continue ou intermittente, sans oublier les gestes bénévoles des salariés à l’esprit coopératif, et qui distribuent des gouttes d’huile salutaires dans les rouages plus ou moins secs de l’entreprise(3).

Propos à méditer

– Tu as de la chance, tu n’as pas de ficelle à la patte, ni salaire, ni patron,
tu peux partir du jour au lendemain.

– De la reconnaissance ? Mais tu n’es pas bénévole ? Tes bénéficiaires ne te le rendent pas assez ?

– Il n’y a que moi qui travaille ici ! Et dire que d’autres sont payés pour faire leur boulot !

– Ralentir le rythme ? Je m’éclate trop / il y a tellement de besoins /
personne ne le fera à ma place

– Je suis un type bien : je suis bénévole dans une association.

Quelques conseils de qvt aux bénévoles

  • Entre bénévolat et sacrifice, il faut choisir : le sens et le plaisir associés à vos activités doivent rester compatibles avec votre santé.
  • Ne négligez pas les réussites, si petites soient elles face à l’ampleur de la tâche.
  • Vous avez vous aussi, droit à l’erreur.
  • Soyez réceptifs aux feedbacks : critiques, ils vous permettront d’évoluer en améliorant vos pratiques; positifs, ils vous permettront d’engranger de la reconnaissance.
  • Les expériences bénévoles sont de plus en plus valorisées par les futurs employeurs, vivez-les comme de véritables tranches de vie professionnelles.
  • Vous “voulez bien”, ce n’est pas le choix de tous. Tous les choix sont motivés et respectables.
  • Vous voulez “le” bien. Attention, une conviction mal contrôlée peut mener à la tyrannie. La prise de recul peut être indispensable… et plus avantageuse que la prise de hauteur (à décliner en responsabilité individuelle et collective) !
  • Votre travail a de la valeur. Viser la qualité de vie au travail en tant que bénévole n’est pas un luxe, c’est une garantie d’efficacité… et de longévité de votre engagement.

 

Voir la suite de l’histoire dans la qualité de vie au travail pour tous.

(1) voir le premier épisode de cette série : l’article La qualité de vie au travail pour tous.
(2) que nous portons et relayons en tant que telle sur laqvt.fr, voir les valeurs issues du rapport mission 2011 de la FNEP
(3) Voir notre précédent article Parlons de gratuité au travail

photo sous licence creative commons – auteur : Anvica

Une réflexion sur “La qualité de vie pour tous (2)

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